Hockey, entretien avec Yorick Treille, entraineur de l'équipe de France

 


Yorick Treille, 45 ans, est l'entraineur de l'équipe de France de hockey sur glace depuis le mois de juin 2024.

Sous sa direction, l'équipe de France a terminé 2 ème du Tournoi pré-olympique en septembre 2024, une place qui devait priver l'équipe de France des Jeux Olympiques de Milan.

A la faveur de l'exclusion de la Russie, la 2 ème place obtenue lors du TQO (devant la Slovénie et l'Ukraine) a permis aux Français d'être repêchés. Pour la première fois depuis 2002 (avec Yorick Treille dans l'équipe), l'équipe de France participera aux jeux Olympiques, en février prochain, à Milan.

A Milan, tous les meilleurs joueurs de la planète seront à sur la glace, ce qui n'est plus arrivé depuis les JO de 2014, à Sochi. La France se retrouve dans une poule effrayante avec, dans l'ordre de ses matchs, la Suisse et tous ses NHLers (Josi, Fiala, Niederreiter, Hirschier, Meier..) le 12 février, la République Tchèque de Pastrnak, Gudas, Palat ou Necas le 13 février et le Canada, équipe étoile parmi les étoiles avec Mac David, Mac Kinnon, Makar, Marner peut être Celebrini, Bedard le 15 février..

Dire que ce sera dur est un euphémisme pour une équipe de France reléguée de élite mondiale en mai dernier et qui disputera le championnat du monde de Division 1A (17 ème au 23 ème mondial) en fin de saison.. 

Il n'y a pas de magie en sport et pour eux, l'ambition sera "de gagner du respect dans la cour des très grands" comme le rappelle Yorick Treille. 

les Français viennent de terminer le premier tour de la Coupe d'Europe des Nations, avec 2 belles victoires contre le Danemark et la Norvège et une contre performance contre la Hongrie (4-6). 

J'ai joint Yorick Treille ce matin. 

Il était en route pour Grenoble, son club d'origine pour assister au 1/8 ème de finale aller entre les Brûleurs de Loups et Frolunda Goteborg. Voici les propos de Yorick Treille, à 93 jours du premier match des Bleus, aux jeux Olympiques contre la Suisse.

Bonjour Yorick, l'équipe de France vient de disputer 3 machs à Epinal, avec 2 victoires. C'est une satisfaction ?

On fait de la compétition donc nous voulons gagner des matchs. Mais je ne suis pas dans le bilan. Nous sommes dans un processus qui va nous amener aux JO de Milan. On est dans la préparation et je sais très bien que lors de JO, le niveau de jeu sera peut être 5 ou 6 crans au dessus de ce que nous venons de vivre. Après, je ne vais pas cracher sur ces victoires. C'est important de gagner des matchs, d'être dans une attitude positive. L'état d'esprit des gars était vraiment top. les 25 joueurs présents ont tout donné sur le plan de la solidarité. ils sont restés connectés ensemble, lié à ce maillot bleu. J'ai aimé l'engagement des gars et leur sérieux.

Physiquement, on sait que l'équipe de France a appris tard sa sélection pour les JO. ou en sont les joueurs ?

Le hockey est un sport de duel et le physique est essentiel. Dans le hockey moderne, c'est capital et c'est un gros critère de sélection. on sait que dans toutes les équipes que nous allons rencontrer aux JO, il y a des gars de 1 m 90 et 100 kilos, adroits, talentueux et il faudra s'accrocher, tenir le rythme. En général, les athlètes sont sur des cycles de 4 ans pour préparer les JO et pour nous, c'est bien plus court mais il faudra faire avec. De la même manière, il y a un grand décalage entre le rythme de Ligue Magnus et le niveau international alors que tous nos adversaires arriveront de la NHL..On sait qu'on va être en difficulté, on va être souvent dans le rouge mais il faudra s'accrocher.

Comment faire justement pour résister notamment lorsqu'on est privé du palet, ce qui sera le cas à Milan ?

C'est toute la question. Bien entendu, il y a la solidarité, la connexion entre les joueurs pour rester compact, laisser le moins d'espace possible. L'une des clés, ce sera de mettre le palet dans les bandes et de lutter pour le récupérer. Si on laisse le centre de glace, notamment dans notre zone, on sera puni en 10 ou 15 secondes. Il nous faudra rester ultra connectés pour faire -si possible- parfois des tout petits jeux, sous pression,  entre défenseur et attaquant dans notre zone pour ressortir le palet. Ces petits jeux ont l'avantage que l'on reste proche les uns des autre et même si le palet est perdu , on reste compact, on est couvert. Et puis parfois, ne pas hésiter à faire des flips pour sortir le palet et compter sur la vitesse de nos attaquants, s'engager comme des malades. Je le répète, le jeu dans les bandes sera primordial comme les mises au jeu. La mise au jeu, c'est une phase arrêtée qui décide du gain du palet ( NB : je me souviens avoir insisté sur des directs pour France Télévision sur la notion de conquête des mises au jeu) et en zone offensive, sur une mise au jeu gagnée, tu peux marquer sur un tir donc avec nos joueurs de centre, on va bosser pour progresser encore dans ce secteur. On va aller aux JO avec beaucoup d'ambition et d'humilité. L'ambition, ce sera de gagner du respect. l'humilité, ce sera d'être en place, constamment dans le dépassement de soi. C'est le minimum syndical pour exister dans la cour des très grands ! On sait que la tâche sera hyper ardue contre les Suisses et je ne parle pas des Tchèques qui ont la culture du très haut niveau et bien entendu des Canadiens. On doit rester bien serré sur la glace. On peut jouer la trappe partout sur la patinoire (jeu qui consiste à être en situation défensive ultra compacte en zone neutre ) et tenter d'être les premiers sur les quelques pucks qu'on pourra récupérer. Ne pas laisser d'espace à nos adversaires sinon on sera punis rapidement.

Ou en es tu de ta sélection ?

Au JO, il y a une sélection de 25 joueurs et la liste est pratiquement finalisé. nous avons 4 gardiens pour 3 places. Il y a une petite hésitation pour savoir si nous emmènerons 9 défenseurs et 13 attaquants ou 14. Il y a l'incertitude Stéphane Da Costa. Si on arrive à trouver un accord, il sera dans l'équipe mais j'ai une stratégie avec lui et sans lui. S'il est là il sera l'un de nos 5 joueurs de centre (selon moi avec Bellemare, Adammo, Boudon et sans doute Nico Ritz).

En 2017, tu avais été écarté de la sélection pour les championnats du monde en France et cette fois, c'est toi qui va devoir couper des joueurs qui ont beaucoup donné pour l'équipe de France. C'est un rôle difficile ?

C'est certain que ce ne sont pas les moments les plus sympa du rôle de sélectionneur.C'est parfois douloureux mais j'essaie d'être dans le dialogue, dans la transparence. Cela peut passer par un coup de fil si le gars est loin ou par un entretien, pour expliquer les raisons du choix. Forcément, les gars sont des compétiteurs et ils se demandent ce que tu leur reproches. J'explique, je fais part des arguments qui m'ont poussé à faire les choix. 

Petite question as tu appelé d'anciens sélectionneurs de l'équipe de France avant de faire tes choix ? ( par exemple, Fabien Galthié avait appelé Philippe Saint André, Pierre Berbizier, Guy Noves et Jacques Brunel avant la Coupe du Monde de rugby en France)

J'ai beaucoup échangé avec Pierre Pousse et Dave henderson depuis 2017 et je reste en contact avec Dave Henderson. On se parle parfois. Je n'ai pas eu la chance de reparler à Philippe Bozon . J'ai fait 5 championnats du monde à ses côté et sincèrement j'ai beaucoup appris à son contact. Depuis son départ, nous n'avons pas eu l'opportunité de parler ensemble mais je me nourris d'échanges avec de nombreuses personnes qui ont une grande expertise en matière de hockey international. On apprend toujours. 

Comment sera composé le staff pour les JO  ?

On sera soudé pour aider les joueurs.  Il y aura Yvano Zanatta qui est avec nous depuis plusieurs saisons, Cristobal Huet " (présent à Nagano et Salt Lake City) qui nous apportera toute son expérience, petit" Luc Tardif (fils de Luc Tardif, président de la fédération internationale de hockey surnommé "petit Luc" pour cette raison) et Flo Hardy pour les gardiens. On se connait tous bien et on va faire le maximum. Les rôles de chacun sont bien répartis. Yvano est en charge de nos défenseurs, du jeu en désavantage numérique et des situations en fin de match à 5 contre 6. Petit Luc lui, va s'occuper de notre jeu de puissance, des situations à 6 contre 5 en fin de match et des mises au jeu. Dans notre organisation, Cristobal a un rôle transversal, il intervient auprès de tous et également sur le scouting de nos adversaires avec Bertand Pousse, en charge de la vidéo. En tout, avec les kinés , médecin, préparateur mental, il y aura une dizaine de personnes pour aider l'équipe et faire en sote que l'on présente la meilleure version possible du hockey français. 




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